vendredi 29 avril 2022

Mélenchon et l’Allemagne : retour à la Ligne Maginot

L’Allemagne, « un monstre, un danger, un poison » : en 2015, un pamphlet de Mélenchon, "Le hareng de Bismarck, le poison allemand", assumait ouvertement une germanophobie débridée, une vision du monde et des relations internationales non seulement archaïque mais profondément chauvine, fondée sur la peur, la méfiance envers un pays qui retrouvait sous sa plume le visage de l’ennemi héréditaire. Une prose nauséeuse que n’auraient sans doute pas reniée les revanchards d’avant 1914. Mais nous étions quand même un siècle plus tard et en 2022, ce sont les pleins pouvoirs (ou le ralliement de tous à son projet) que réclame Mélenchon.

Mélenchon et l’école : un financement de gauche pour une école de droite.

 Dans un contexte électoral toujours plus dévoyé, où les combines de couloir, l’expression des ego délirants tiennent lieu de débat démocratique, l’école se voit cantonnée à son rôle habituel : soit complètement oubliée, soit objet de toutes les propositions démagogiques. Et alors que la gauche ne s’est jamais singularisée par son courage ni par sa lucidité en la matière, qu’une partie de la gauche se prépare à sacrifier les quelques valeurs qui lui restent aux pieds de la France dite Insoumise et de son grand chef, il n’est pas inutile de rappeler que le projet Mélenchon exprime sur l'école une vision lourdement conservatrice, voire réactionnaire. Les milliards d’euros annoncés ne changent rien à l’affaire : même avec un financement de gauche, l’école rêvée par Mélenchon reste une école de droite.

dimanche 24 avril 2022

Qu’est-ce qu’être français ? Une mauvaise réponse pour une mauvaise question.


« Qu’est-ce qu’être français ? » Même dans la troisième décennie du 21e siècle, cette question qu’on croyait d’un autre âge n’en finit pas d’occuper le devant d’une scène politique qui n’a rien de plus conséquent à proposer à l’électeur. Mélenchon, à qui la devinette a été posée (25/11/2021, BFMTV), ne s’est pas vraiment différencié d’une droite – extrême ou non – que le sujet rend folle.

jeudi 21 avril 2022

Suzanne Citron

« Mes lignes de démarcation », l’autobiographie de Suzanne Citron, vaut à la fois comme le récit d’une époque (1940-2000) mais aussi comme le témoignage d’un engagement. Enthousiasme et désillusions autour de la vie politique, de la société mais surtout de l’école et de l’histoire à l’école. Après le « foisonnement des années 60 », arrivent « les désarrois des années 70 » et la constatation que « la réforme n’aura pas lieu »… Le récit s’arrête à la fin du millénaire mais les 20 premières années du nouveau n’auront sûrement pas été de nature à faire renaître l’optimisme, avec une école refermée sur elle-même, ballotée dans la recherche d’un âge d’or qui n’a jamais existé, au cœur d’un pays durablement traversé par ses mauvais démons.

Dans un contexte politique à la fois irrationnel et angoissant, où le pire est désormais une hypothèse comme les autres, les dernières lignes écrites par Suzanne Citron dans son autobiographie remplacent avantageusement toutes les paroles insensées entendues au cours de cette campagne électorale.

mercredi 20 avril 2022

Contre l'éducation, le choix des dépenses militaires

Selon le Cevipof (04/2022), une majorité de Français souhaitent une augmentation des dépenses publiques pour l’Ecole… et pour la Défense. Une majorité de Français à qui l’incompatibilité entre les deux exigences ne fait pas problème : il est vrai que le tabou qui entoure les dépenses militaires n’est pas de nature à éclairer le débat.

mardi 19 avril 2022

Entre une droite décomplexée et une gauche timorée, l’école dans une impasse

Un projet éducatif de droite, on sait de quoi il retourne : sélection précoce des élèves, contrôle renforcé de l’administration sur les enseignants (sous couvert d’autonomie des établissements), abandon de toute ambition culturelle au profit d’un recentrage sur les rudiments, bref un projet de classes. Un projet éducatif de gauche, comme alternative crédible à un projet de droite, on n’en a toujours pas vu la couleur.


lundi 18 avril 2022

Pour faire barrage à l'extrême-droite : abroger la loi contre le séparatisme

Exaltation de l’identité nationale, refus des différences, besoin pathologique de s’inventer un ennemi (l’immigré, le musulman, l’Arabe, mieux encore lorsqu’il s’agit des trois à la fois…) : si les fondamentaux de l’extrême-droite ne changent pas, il est souvent difficile d’accepter l’idée qu’ils sont partagés sur un espace politique et culturel beaucoup plus large, entretenant une forme de confusionnisme dont on n’a pas fini de payer le prix. Un des exemples les plus saisissants reste la loi réputée lutter contre le séparatisme - officiellement « confortant le respect des principes républicains » - votée en février 2021 à l’issue d’un débat public bruyant et indécent au cours duquel tous les poncifs habituels de l’extrême-droite se sont trouvés légitimés sur les bancs du Parlement comme à travers les médias. Une loi tout entière visant la population de confession musulmane, érigée en ennemie publique, considérée comme une menace qu’il convenait en urgence d’éradiquer. Une loi se donnant comme objectif d’apporter une solution (finale ?) au « problème musulman », comme en d’autres temps, on se focalisait sur la « question juive »…

jeudi 14 avril 2022

L'extrême-droite aux portes du pouvoir : relire Sternhell

 

Dans le contexte électoral actuel où l’extrême-droite se voit honorée de toutes les légitimités, dissimulant derrière un discours prétendument social ses fondamentaux racistes et xénophobes, dans un moment où une partie de la classe politique semble davantage préoccupée de régler ses comptes avec Macron plutôt que de préparer sérieusement l’avenir, où l’europhobie de Le Pen rencontre l’europhobie d’une certaine gauche, où la critique des institutions politiques tourne à l’attaque contre la démocratie, où les si mal nommés antifas relancent leur traditionnelle campagne de défoulement urbain, dans cette conjoncture délétère donc, la (re)lecture de Zeev Sternhell (première édition : 1983) vient à point nommé rappeler une vérité historique : la France est une terre d’élection du fascisme. La collusion d’une certaine gauche avec une certaine droite n’est donc, dans ce pays, ni une surprise ni une chose nouvelle.

samedi 9 avril 2022

Marseillaise à l'école : une Education décidément trop nationale

 « Qu’un sang impur abreuve nos sillons ! » Scandée avec exaltation, la Marseillaise est la conclusion obligée de tous les meetings de droite et d’extrême-droite, à peine plus discrète à gauche où les symboles nationaux ont fait depuis quelques décennies un malencontreux retour en force qui coïncide – comme c’est curieux – avec la poussée électorale de l’extrême-droite. Un retour en force dans lequel l’école a tenu une place toute particulière, contribuant, à coup d’injonctions administratives répétées, à légitimer les fantasmes identitaires chez les jeunes générations et dans une large partie de l’opinion. Sans jamais être particulièrement interrogé, encore moins remis en cause par les enseignants…


Petit retour sur 40 années de Marseillaise à l’école. 

mercredi 6 avril 2022

Pestilentielles 2022 : les grenouilles qui demandent un roi

Des foules en extase devant un hologramme, des marées de drapeaux tricolores enveloppant un tribun perché sur sa tribune, des visages passant et repassant plusieurs fois par jour, chaque jour, chaque semaine sur les télés et dans les radios, ressassant chaque jour, chaque semaine les mêmes discours, déroulant le même catalogue de promesses auxquelles chaque électeur est censé croire, beuglant les mêmes slogans, les mêmes invectives reprises en chœur par l’auditoire du jour : une campagne électorale qui donne une singulière image de la vie politique en France, dominée par la figure du chef traçant la voie pour son peuple. Mais ici, le peuple est surtout un troupeau.

dimanche 3 avril 2022

Le venin dans la plume, le venin dans l'école

 

Avec plus d’un tiers des électeurs votant au premier tour pour Zemmour, Le Pen ou Dupont-Aignan, la victoire finale de l’extrême-droite aux présidentielles fait désormais figure des scénarios possibles. Alors qu’en 2002, l’accession de Le Pen père au second tour avait suscité une émotion considérable – des manifestations de masse suivies par un vote tout autant massif de rejet – il n’en est plus de même 20 ans plus tard, avec la banalisation de la rhétorique d’extrême-droite et son acceptation dans une large partie de l’opinion publique. Une banalisation que n’expliquent, quoiqu’en disent de savants experts, ni l’impopularité de l’actuel président (autant qu’on sache pas plus impopulaire que ses prédécesseurs à la fin de leur mandat) ni la situation économique et sociale d’un pays, qui, en dépit de ses défauts et des inégalités qui le traversent, reste l’un des plus riches du monde. L’analyse facile selon laquelle le vote d’extrême-droite serait d’abord un vote de colère, de frustration, de la pauvreté – outre qu’elle n’est étayée par aucune étude fondée – n’est pas crédible : on peine à comprendre pourquoi les plus démunis – au nom desquels d’éminents spécialistes s’autorisent à parler – apporteraient leur suffrage à des candidat.e.s dont toute l’analyse économique et sociale se ramène à l’expulsion des immigrés et à la fermeture des frontières. Une politique de brutalisation que n’effacent pas les catalogues ubuesques de dépenses (toutes chiffrées en milliards ou dizaines de milliards d’euros…) annoncées en catastrophe à quelques jours du scrutin pour soudoyer l’électeur. Après mon élection le déluge…

Dans ces conditions, il faut se poser la question de savoir pourquoi, en Europe, la France se distingue, avec constance, au fil des ans, par cette disposition impressionnante pour le vote d’extrême-droite (à comparer par exemple à l’Allemagne où le scrutin de septembre 2021 a donné 10,3 % des voix à l’AfD). Si l’on exclut ou que l’on relativise comme cause première le contexte économique et social, il faut alors se tourner vers d’autres facteurs, par exemple historiques – la France est un terreau de l’extrême-droite (voir entre autres les travaux de Z. Sternhell) – ou encore culturels. Orgueil national (même si ce dernier est largement partagé à gauche), méfiance envers l’étranger, rejet des migrants, racisme, islamophobie (dont la propagation dans le discours public même officiel n’est pas pour rien dans la fabrication du candidat Zemmour) : incontestablement, dans le vote d’extrême-droite, la motivation identitaire reste première.

Dans cette note de blog (initialement publiée le 05/11/2019), j’interroge le rôle de l’Ecole dans la formation de représentations dangereusement identitaires chez les élèves, à travers notamment les programmes d’histoire et d’EMC. A deux ans et demi de distance, je ne vois pas ce que je devrais changer à cette note…sinon pour s’inquiéter de voir, avec le SNU, se renforcer la place des rituels patriotiques obligatoires dans le cursus des élèves. Faire chanter chaque matin la Marseillaise à des jeunes au garde-à-vous devant le drapeau tricolore n’est sans doute pas le meilleur moyen de leur faire adopter un regard critique sur les fantasmes de l’extrême-droite. 

Le venin dans la plume, le venin dans l'école

Le venin dans la plume, le venin dans l'école

  Avec plus d’un tiers des électeurs votant au premier tour pour Zemmour, Le Pen ou Dupont-Aignan, la victoire finale de l’extrême-droite ...