vendredi 31 mars 2023

SNU : entre adhésion dogmatique et préoccupations financières, la dérive de l’éducation populaire

 

« Le SNU, pourquoi pas mais pas dans sa version actuelle… » L’entretien particulièrement contourné de son directeur général au Café pédagogique (31/03/2023) confirme l’ambiguïté des Ceméa sur le SNU. Un sujet à propos duquel toute une partie de l’éducation populaire s’est lourdement décrédibilisée.


« Tel qu’il est engagé à l’heure actuelle, on s’en méfie », explique J.-B. Clerico. Une méfiance sans doute à géométrie variable puisque, dès juin 2019, cette même association avait signé avec le gouvernement une convention de partenariat qui l’impliquait sans ambages, au côté de quelques autres, dans un dispositif d’embrigadement généralisé dont la nature était déjà connue de tous. Une complicité renforcée un peu plus tard pas une déclaration d’intention (20/10/2020) signée avec la secrétaire d’état Sarah El Haïry dont l’objectif affiché était de « lutter contre le séparatisme » et de faire « retrouver la fierté dans la nation ». Dès le départ, la connotation fortement identitaire et militarisée du SNU ne semble donc pas avoir posé de problème de conscience à ces associations d’éducation populaire. Peut-être même la Ligue de l’enseignement retrouvait elle dans le SNU le souffle de sa fondation : « pour la patrie, par le livre et par l’épée » (1)…. Et lorsque le secrétaire général des Ceméa affirme ne pas être « contre le principe même de l’obligation », c’est alors reconnaître une valeur éducative à la coercition et la punition, corollaires de l’obligation. Chargeant un peu plus la barque, le même évoque sans état d’âme la participation active des Ceméa au service militaire adapté (SMA) vu comme un « facteur d’intégration ».

Il fut paraît-il un temps où l’émancipation était une valeur cardinale de l’éducation populaire…

Reste également que la participation au SNU de l’éducation populaire est aussi (d’abord ?) une affaire de gros sous, « un besoin économique » pour le secrétaire général des Ceméa, expliquant à qui veut comprendre que la généralisation du SNU sur le temps scolaire « permettrait [aux associations] d’accueillir plus de monde sur l’année et de rentabiliser leur équipement ».

En faisant du SNU et de l’embrigadement généralisé des jeunes un retour sur investissement c’est peu dire que les associations d’éducation populaire ont perdu une bonne partie de leur crédibilité et de leur légitimité. 

 

(1) Sur la compromission de  la Ligue de l'enseignement et de la fédération Léo Lagrange, voir cette note de blog :

https://blogs.mediapart.fr/b-girard/blog/191118/ligue-de-l-enseignement-leo-lagrange-au-garde-vous-pour-le-service-national


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